Et pour quelques munitions de plus

Faisant grincer sa rocking chair en se balançant dessus, Jaina Rosenberg espérait pouvoir s'endormir comme un bébé bercé dans les bras de sa mère. Malheureusement, l'albinos n'arrivait pas à fermer l'œil, cogitant à cause de ses nombreuses péripéties passées. La main gauche avec une attelle, l'épaule droite recouverte de bandages, la cow-girl détruisait petit à petit son corps sans trop se soucier des conséquences. La faute aux nombreux ennemis plus fort les uns que les autres, surtout depuis Grand Line.

Allait-elle prendre soin de sa santé ? Non, certainement pas. Au fond de son être, la desperada sait que la vie est très courte, surtout en étant un pirate. De plus, son albinisme n'arrange aucunement les choses. Jaina se donne dix années avant de mourir. Soit en succombant de son handicap génétique, soit en perdant la vie à cause d'un adversaire plus fort qu'elle. Et puis bon, en dix ans, Wanda sera suffisant grande pour vivre toute seule. Peut-être aura-t-elle des enfants, un mari adorable, chose que Jaina n'a pas trouvé.

Ouvrant son paquet de clopes, attrapant une cibiche avec ses dents d'une blancheur élégante, elle sort son Zippo à l'effigie de Sogeking pour brûler la tête de sa cigarette. Encore un truc qui lui bouffe la santé : le tabac. Se retirant de sa chaise, l'albinos s'en va de ses quartiers pour se diriger dans la cuisine. De là, elle chauffe de l'eau et attrape une boîte contenant du thé pour y infuser un Luvneel Breakfast. Une petite découverte très délicieuse qui possède un goût différent du Earl Grey.

Finissant sa préparation, la cow-girl s'empresse de tremper ses lèvres dans cette eau aromatisée et bienfaitrice. Elle échappe un soupir de bonheur, de bien-être et repense soudainement à son conflit de quelques jours contre le redoutable Commodore. Ce dernier utilisant le Haki de l'Armement venait de révéler un grand point faible de la tireuse. Ses balles, ses ogives étaient inefficaces. Incapable pour le moment d'enrober ses munitions de ce fameux fluide, la Vouivre Immaculée doit trouver une alternative...

Calant son postérieur contre le plan de travail de la cuisine, Jaina Rosenberg envisage d'apprendre par elle-même à fabriquer ses propres balles. Une affaire délicate et nullement facile. Cependant, en mer sur la Banshee à attendre que le temps passe, la cow-girl peut tout à fait s'exercer au lieu de se tourner les pouces. Décidée à franchir ce cap, la Capitaine des Ravengeuses termine son thé, nettoie sa tasse et la fait sécher, puis elle se dirige dans l'armurerie pour y récolter les ingrédients nécessaires. Des outils pour permettre de disséquer ses ogives, de la poudre à canon, du plomb et d'autres éléments pouvant servir dans ses futures inventions...

De retour dans sa cabine, bien nettoyée, car l’albinos déteste vivre dans une pièce crade, elle dépose son attirail sur son bureau, son nouveau plan de travail. Elle échappe un soupir d’effort tout en se massant le front avec son avant-bras. N’y connaissant encore rien dans la composition d’une balle, la pirate s’est préparée à l’éventualité de construire ses propres gadgets. Comment a-t-elle fait ? En achetant plusieurs ouvrages dans une librairie pendant son temps libre au Royaume de Luvneel. Ainsi, en prenant un premier livre de son étagère, l’albinos s’installe confortablement sur sa rocking-chair et entame la lecture de la première page…

On frappe à la porte, plusieurs fois même sans que la propriétaire de la chambre qui est Jaina Rosenberg invite le perturbateur à entrer dans ses quartiers. Une voix reconnaissable entre mille, accompagne ses tapotements. Les notes sont plutôt inquiètes. Wanda Rosenberg ose ouvrir la porte qui bloque son chemin pour rejoindre sa chère mère. L’adolescente détenant un grand pansement sur sa joue gauche écarquille de surprise ses cristaux de sang en découvrant une multitude de livres ouverts et fermés sur le tapis recouvrant une bonne partie de la pièce. Jaina est allongée sur le sol, faisant l’étoile de mer, un bouquin reposé sur son visage. Sa respiration est lente, calme et nullement anormale. En vérité, l’albinos s’est endormie après une nuit entière à étudier différents sujets sur la composition des balles. Beaucoup de blablas étaient à mourir d’ennuies, surtout les conseils pour éviter de se faire sauter en remplissant trop de poudre dans la douille. Voilà la cause de son endormissement.

Son réveil survient juste après, quand Wanda vient de ramasser plusieurs livres et qu’elle a déposé la pile sur une petite table en chêne. Jaina Rosenberg baille sans placer sa main devant sa bouche qui est grandement ouverte, elle étire ses bras et gémit délicatement. Se redressant sur ses fesses, pliant ses jambes contre son ventre, la cow-girl répond au sourire de son enfant en effectuant la même chose.

« Bon matin. » commence à dialoguer le louveteau qui s’empresse de s’asseoir sur la rocking chair. Elle adore s’y balancer depuis son tout premier essaie. Cela amuse sa maman qui échappe un petit rire cristallin. « Je croyais que tu n’aimais pas lire. Jessica déteindrait sur toi ? »

Il est vrai que d’avoir vu la blonde bouquiner des livres lui avait donné la puce à l’oreille pour remédier à son nouveau problème. Pour obtenir des connaissances, Jaina pouvait étudier les encyclopédies, les notes, les ouvrages écrient par des génies et des passionnés. C’est ce qu’elle vient de faire depuis plusieurs jours en dormant très peu, obligeant son corps à pousser la sonnette d’alarme et à mettre en veille la cow-girl. Se frottant le visage à cause d’une migraine passagère, la desperada choisit de répondre à son bourgeon de rose.

« J’aimerai créer mes propres munitions. » avoue-t-elle en se relevant et en arquant son dos pour chasser une vilaine crampe. « Depuis ma mésaventure avec Moret, j’ai compris une chose essentielle. Je suis complètement faible. »

« Pardon ?! Tu es sérieuse maman ?! » rouspète l’ado qui vient de se retirer de sa chaise et de plaquer férocement ses mains contre sa taille. Elle lâche un souffle désespérée. « Dois-je te rappeler que tu peux désormais devenir un monstre légendaire ? Que tu as battu un grand pirate sur North Blue et de grands gradés de la Marine ? C’est l’hôpital qui se fou de la charité. »

« Chipie, le Commodore était un spécialiste du fluide de l’Armement. Il a réussi à contrer ma dynamite et mes balles sans sourciller. » explique la cow-girl qui se contraint elle-même à ne plus fumer à côté de son enfant. La tentation a été rudement difficile, si bien que Jaina a machinalement attrapé son paquet de clopes. Mais vu que Wanda ne fume pas, la pirate préfère s’abstenir pour la santé de l’adolescente. « N’étant pas encore capable de faire comme lui, d’utiliser ce genre de Haki, je préfère améliorer mes munitions. »

Cherchant de son regard carmin une encyclopédie lut hier matin, Rosenberg finit par le retrouver sur son lit porteur de draps pourpres. Elle ouvre le volume où se trouve un marque page et le tend à son adorable petit louveteau. Cette dernière le saisit et inspecte les deux pages visibles mentionnant la balle explosive. Une ogive capable de faire une quantité de dégâts supérieurs à une balle normale. Visiblement sa mère espère pouvoir fabriquer ce genre de munitions.

« La balle explosive pourrait me permettre de contrer mes ennemis utilisant ce fluide. Même si mon ogive sera contrée par cette technique, l’explosion pourrait causer des dégâts sur une ou des parties du corps de l’adversaire dont il ne s’y attendait pas. » Attrapant un morceau de papier et un crayon à bois, la pirate fait un croquis passable de ce qu’elle essaie d’expliquer. Sur son schéma digne d’un enfant de bas âge apprenant à dessiner, la pointe en plomb de sa munition se décompose en plusieurs particules pour nuire à l’adversaire. « Mais, à mon niveau c’est impossible de reproduire cette munition. »

Redonnant l’ouvrage à Jaina, Wanda pose son derrière sur le bureau et attrape le Den Den Mushi effectuant un petit somme. Son index et son majeur se déplacent comme s’il s’agissait d’une paire de jambes. Elle sourit doucement à sa mère après avoir, selon ses pensées, trouvé la solution aux problèmes de sa daronne. Si Jaina Rosenberg est incapable de reproduire une balle de ce calibre, une personne du très faible cercle d’amis de cette dernière peut l’aider. Il lui suffit simplement de composer un numéro.

« Et si tu demandais conseil à ton amie armurière Freya ? Après tout, elle bosse actuellement pour toi dans ton entreprise Calamity Arms Compagny. »

Ouvrant grand ses mirettes sanguines après avoir entendu cette idée lumineuse provenant de sa chère fille, Jaina s’empresse d’emprisonner Wanda dans ses bras et d’embrasser à deux reprises son front. Décidément, le génie dans cette famille ce n’est nullement Jaina, mais sa fille. La cow-girl quand à elle, est l’idiote de la fratrie…

Le micro à ses lèvres, Jaina attend patiemment que le Den Den capte celui de sa chère et amusante collègue. Cela fait longtemps que la pirate n’a pas parlé directement à l’armurière, qui est la fille d’un grand médecin sur Hat Island. Paix à l’âme du Doc McCoy qui est mort, d’une raison que Jaina ignore encore. Freya n’a jamais voulu lui en parler et l’albinos ne souhaite pas entrer dans la vie privée de sa camarade. Surtout au vu du comportement très explosif d’O’Hara. Elle est peut-être encore plus chaotique que Jaina. Néanmoins, la cow-girl a toujours respecté son génie pour construire des armes à feu. Elle est de loin la meilleure armurière d’Hat Island et fort heureusement cette demoiselle travaille dans la micro-entreprise de la Ravengeuse.

Tapotant ses phalanges osseuses contre le rebord de son bureau, signe que sa patience est très vite fracturée, Jaina s’apprête finalement à raccrocher en constatant que son amie doit être lourdement occupée. Finalement, le Den Den s’allume et émet la voix Freya O’Hara.

« Ouais cé pour quoi ? Jé suis trop occupé, j’espère que cé important ! » gueule de mécontentement la voix féminine à l’autre bout de la ligne. Machinalement, un sourire niais se dessine sur le visage de Jaina, fabriquant des rides aux extrémités du bout de ses lèvres. Elle se présente, la salue convenablement avec une petite injure à la fin, car une cheffe d’entreprise ne doit pas être reçue de la sorte. Un simple taquinement venant de la part de Jaina. « Pardon, jé eu une nuit horrible à réparer une arme d’un cow-boy. Qué puis-je faire pour toi amiya. »

« J’ai besoin de tes connaissances, de tes conseils pour confectionner mes propres munitions. » répond la pirate, qui malheureusement n’a pas le temps de poursuivre ses explications. Car oui, Freya coupe la parole à la Chapeauté d’Hat Island.

« Tù veux faire des cartouches normales ? » Souhaitant acquiescer, répondre positivement à son amie, cette dernière ne lui laisse aucun répit pour reprendre la parole. « Jé peux t’apprendre à confectionner des balles explosives. Ou bien peut-être des munitions paralysantes ou empoisonnées. » poursuit la passionnée des armes à feu. Sa réputation de moulin à paroles n’est visiblement pas usurpée, fausse, mensongère. « Ça mé fait penser qué tu veux être la Reine des tireurs. Un comble pour une démoiselle ne sachant pas fabriquer ses… »

« Justement, tu vas m’aider !! » coupe aussitôt Jaina, énervée de la dernière phrase de l’armurière. En colère, surtout parce que Freya touche un point sensible, la bouille de la pirate est rouge de fureur. Ses trous d’oreilles font ressortir de la fumée, comme la cheminée d’une locomotive. Après le petit rire moqueur de sa camarade, cette dernière lui demande de prendre des feuilles vierges et un crayon neuf, visiblement Jaina va devoir beaucoup écrire.

Après une heure de conversation téléphonique, les deux femmes coupent l’appel. Rosenberg dispose à présent des instructions pour créer des balles. Si la théorie peut être maîtrisée, la pratique sera une autre histoire. Remontant les manches de sa chemise blanche, Jaina entame ses premiers essaies en suivant les notes de Freya. La tâche n’est aucunement simple, elle est extrêmement compliquée, surtout pour les dosages de poudre. Ses premiers essaies sont testés sur le pont de la Banshee. Avec un pistolet à silex, la cow-girl expérimente ses récentes créations.

La toute première cartouche fait exploser le canon du pistolet. Par chance, la détonation ne cause aucun dégât pour la paluche de la tireuse. Sur son carnet, Rosenberg raye la munition numéro une et écrit à la suite le mot : échec. Saisissant un deuxième pétard, un simple fusil, la Capitaine des Ravengeuses visent une mouette faisant trempette sur la mer. Pressant lentement la détente, le coup de feu retentit. La balle plonge directement dans l’eau salée au lieu d’effectuer une ligne droite pour toucher l’oiseau. Sur sa liste, la deuxième expérience est également barrée et mentionnée : échec.

Au final, après d’innombrables essaies, tentatives pour seulement une balle normale, la cow-girl essuie constamment des faillites. Jetant de toutes ses forces le pétard contre le Deck, la maudite hurle de tout son être pour exprimer sa rage de ne pas réussir. Toutes ses heures à étudier et à expérimenter pour rien. S’apprêtant à partir défaitiste, elle se rend compte que sa liste mentionne une dernière cartouche porteuse du numéro quarante-sept. Ne perdant rien à essayer, l’amoureuse des armes à feu reprend sur le sol et recharge son pétoire. Elle actionne le mécanisme de son pistolet pour que le percuteur enflamme le cul de la douille. À cet instant, l’ogive sort du canon et perfore le chapeau d’un Os, l’un des larbins de Jessica Hellhound. Plissant ses cristaux d’un rouge rivalisant avec la couleur du sang, penchant sa tête sur le côté, l’albinos percute que le Mark quarante-sept est une réussite…

Désormais, la cow-girl va pouvoir travailler sur la recette de cette création pour parfaire ses travaux de balles efficaces contre les utilisateurs du fluide de l’Armement. Enfin…quand Jaina aura acquis une plus grande expérience sur cet artisanal, ce qui n’est pas le lendemain de la veille…