Quinte Flush avec une paire de dame

Comparé à Hat Island, Shimotsuki était vraiment exotique, limite un petit paradis. Pas de désert en vue. Pas de grosses chaleurs. L’endroit idéal pour une femme atteinte de la maladie de l’albinisme. Son petit séjour dans cette contrée devint agréable pour celle qui ne devait pas rester longtemps.

Son maître, son professeur lui avait confié la tâche de se rendre sur cette île plus précisément dans le village portuaire de Nagaya. Elle ne connaissait pas encore les détails de sa mission. Elle soupira discrètement en tirant les rênes de sa jument Orphée.

Pour le moment, Jaina était à la recherche d’une étable et contrairement à Hat Island, ce genre d’endroit ne courrait pas trop dans les rues. Finalement, elle finit par demander à un passant. Sauf que sa réaction n’enchanta guère celle qui ressemblait à un vampire. Ses orbes sanguines, sa peau pâle et ses cheveux décolorés firent peur à l’homme qui pris ses jambes à son cou.

« Connard… » marmonna dans sa barbe invisible la cow-girl.

Le museau d’Orphée entra en contact avec la joue de sa maîtresse. Elle commençait à avoir grandement faim. Tendrement, Jaina caressa du bout de ses doigts le doux chanfrein de sa monture.

« Je suis désolée ma belle, je vais te trouver de quoi manger sur la route. » répondit l’albinos qui repéra un stand de fruits et légumes.

Tirant sa jument à l’aide des rênes, la Rosenberg sortit une petite bourse de pièces et en donna deux pour acheter quatre carottes. Ces légumes étaient la nourriture favorite de sa jument. Elle en raffola et pouvait bouder le foin ou l’herbe pour pouvoir dévorer ces échantillons de couleur orange.

« Je cherche une écurie, y’en a dans le coin ? » demanda la cow-girl au vendeur du stand. Ce dernier lui indiqua chaleureusement une rue où la pirate trouvera son trésor. « Merci l’ami. » fit-elle en retirant de justesse ses doigts de la carotte qui fut gobée en une seule bouchée par Orphée.

Une fois au lieu-dit, Jaina confia sa fidèle amie au palefrenier de l’étable. C’était un charmant jeune homme qui devait avoir un âge presque similaire à la Rosenberg. La demoiselle n’étant pas attirée par le sexe opposé, elle dut bien reconnaître que ce type dégageait un certain charme. Se mordillant la lèvre inférieure, Jaina détourna son regard rubis du palefrenier pour éviter de faire une belle bêtise.

Elle sortit des écuries, repéra une auberge proche de sa position et s’y rendit. Au lieu d’entrée par des portes battantes, Jaina dût franchir une simple porte. C’était extrêmement bizarre et beaucoup moins classe. Refermant l’entrée derrière elle, la cow-girl entama des pas jusqu’au bar. Sa démarche trompait ses origines d’Hat Island. Que ce soit homme ou femme, une grande partie des citoyens de l’île western marchaient comme des cow-boys. Mains à la ceinture, clope au bec et des pas lents pour faire gémir les éperons accrochés aux santiags.

« Un whisky et le plat du jour. » lança l’albinos au tenancier.

Elle posa son derrière sur un tabouret et ralluma sa cigarette éteinte avec un briquet en or. Jaina haussa l’un de ses fins sourcils en repérant une demoiselle qui était très différente des autres nénettes que l’albinos avait croisées. Sérieusement, elle portait des oreilles de renard sur sa tête. Charmante. Jaina lui adressa un petit clin d’œil.

Tapotant le dos de sa cibiche pour y retirer la cendre, Jaina pinça à nouveau sa drogue entre ses lèvres et retira ses lunettes de soleil qui protégeaient ses rubis du soleil.

« Y’a-t-il une place pour moi ? J’adore jouer au poker. » exclama l’étrangère qui sortit de son blouson une carte représentant la dame de cœur. « Je suis la meilleure à ce petit jeu, autant vous prévenir… »

Jaina avait demandé si une place vacante était disponible pour rejoindre la partie de poker. Elle s’attendait à un simple non. Avec surprise, la Mink invita la cow-girl à prendre la place d’un homme porteur de vêtements qui trahissaient grandement sa sombre profession. Un Yakuza sans doute. La Rosenberg ne se souvenait pas d’avoir croisé un tel spécimen dans son île de North Blue. A Hat Island, on y trouvait majoritairement que des cow-boys et des cow-girls. Le Western à l’état pur.

Elle sut au moins une petite chose durant son absence au ranch familial. Les Yakuzas pouvaient être beaucoup plus dangereux qu’une simple bande de brigand d’Hat Island. La Mafia disposait toujours d’un arsenal beaucoup plus important et avancé que les fermiers hors-la-loi.

Croisant sur son chemin l’homme au physique assez impressionnant qui lui cédait sa place, Jaina tapota l’épaule de celui qui faisait encore deux têtes de plus qu’elle.

« On voit qui porte la culotte de la famille, hein mon grand ? » se moqua l’albinos qui se délecta de la réaction énervée du gaillard. Pas de chance pour lui, le toutou devait obéir bien sagement à sa maîtresse au vu des événements qui vinrent de se dérouler.

Tirant le dossier de sa chaise afin de pouvoir s’asseoir sur cette selle en bois, Jaina Rosenberg remarqua que la ravissante jeune femme désirait connaître l’identité de l’albinos.

« On m’appelle Jane. » répondit Jaina de sa voix calme qui lorgnait le beau visage exotique de la demoiselle. Plissant ses iris rouges sang très horrifique, la fausse vampiresse se questionna sur l’âge de son interlocutrice. Si jeune, si charmante et si mystérieuse. « Et toi ? C’est quoi ton petit nom ? Je n’ai jamais vu de femme humaine porteuse d’oreilles d’animal. »

Lentement, les griffes de Rosenberg saisirent les jetons qui furent donnés gratuitement par la maîtresse du Yakuza. Si généreuse alors que la femme ne savait pas qu’elle invitait un être maléfique à sa table.

« Messieurs. » interpella Jane aux autres Yakuzas qui eurent reçu l’ordre de chercher quelque chose à boire pour les deux femmes. « J’avais commandé un whisky et un plat chaud. Peut-être qu’ils sont déjà prêt sur le buffet du comptoir. » informa Jane qui ignora les regards méprisants des messieurs.

Comptant minutieusement ses jetons en laissant parler la belle joueuse, Jaina Rosenberg stoppa son action quand elle crut entendre et comprendre une sorte d’invitation venant de cette Ayami Date. Elle lui indiqua qu’elle pouvait effectuer une fouille au corps-à-corps pour éviter une potentielle tricherie de la part de la pirate.

« As-tu au moins l’âge pour effectuer cela ? » questionna Jaina qui apprit tout en même temps qu’Ayami n’était pas n’importe qui. « Tu es donc marié ? Moi qui te voyais jeune alors que tu endosses déjà le rôle d’épouse. En plus de cela, tu es infidèle… » dit-elle dans un murmure pour éviter que le maître du jeu soit trop curieux.

Cela dit, Jaina ne ressentait aucun stress depuis qu’elle avait compris qui était cette Ayami Date. Si les futurs événements s’avancèrent dans de la confrontation direct, les joujoux de la cow-girl pourront chanter.

Prenant les cartes distribuées par le Yakuza, l’albinos fut surprise du mauvais jeu dans sa manche. Elle se mordit la lèvre inférieure en signe de contrariété et misa sur la chance en renvoyant sa main pour obtenir de meilleures cartes.

« Ce Ayame Iyazaki, il m’a l’air terrible à la vue de sa bande de petits copains. Heureuse d’avoir épousé un homme de sa trempe ? » demanda la curieuse qui poussa une pile de jeton pour la première manche de poker.

Un homme de main de la Mink donna le plat chaud et la boisson de l’albinos. Enfin, elle pouvait apaiser son grand appétit pour les boissons alcoolisées et remplir par-dessus le marché son estomac de nourriture.

« Santé ! » exclama Jaina à sa nouvelle camarade de jeu. Elle but le contenu de son verre en plusieurs gorgées puis débuta la dégustation de son plat après avoir présenté une double paire dans son jeu. Deux dames et deux rois, sans oublier un as de cœur. « Tu peux faire mieux ma jolie ? J’ai une petite idée, la personne qui perd devra répondre honnêtement à deux questions de la gagnante. Partante ? »

Jaina dévoila son jeu. Deux rois, deux reines et un as de cœur. La chance lui avait donné une seconde main gagnante et non perdante. Cette partie se dévoila très intéressante pour la Rosenberg. Pas besoin de tricher pour le premier tour. Car oui, l'albinos était experte dans ce domaine. Le nombre de fois où les petites cartes dans ses manches lui permettaient de remporter de grosses mises. Bien entendu, il eut des jours où même la triche ne lui laissait pas l’occasion de se remplir les poches. Dans ces moments, on l'avait viré du saloon ou bannissait de la ville. C'était mieux que la corde autour du cou réservé aux habitants d’Hat Island.

Tournant sa fourchette entre ses doigts tout en mastiquant le poulet à la crème entre ses dents, Jaina fut impatiente de découvrir le jeu de la Mink. Ainsi, cette femme faisait partie de cette espèce exotique. Elle dégageait un charme bien étrange et envoûtant. Le premier venu se jetterait dessus si cette dernière était consentante. Pour Jaina ? Elle avait horreur de tomber dans ce genre de piège. C'était plutôt elle qui invitait et pas l'inverse.

Jaina ne put retenir un sourire de triomphe en étant témoin du jeu médiocre de son adversaire. Une simple paire de valets. La première manche revenait à la cow-girl. Posant sa fourchette près de son assiette, Jane se pencha contre la table en ouvrant ses bras puis en les refermant pour récupérer les jetons. Lentement, elle les tira dans son coin de table tout en ne quittant pas les mirettes de la jeune femme.

« Si tu veux tu peux répondre honnêtement ou te taire à mes questions. » commença Jaina d'une voix calme et presque envoûtante. « Voici ma première question. Pourquoi épouser un Yakuza ? » Elle fit le signe de deux avec son index et son majeur. « Deuxième question. Qui sont les autres personnes qui influencent sur cette île ? »

Deux questions qui trônaient dans l'esprit de la hors-la-loi. Jaina préférait savoir où elle mettait les pieds pour éviter les mauvaises surprises. Enfin, sa curiosité pourra être rassasié si la Mink daignait répondre aux interrogations.

Comptant son nouveau butin en enfilant un gros morceau de viande dans son gosier, elle sentit l'énervement des yakuzas qui surveillaient la partie de poker.

« Inutile de vous énerver les louveteaux non léchés. Faut pas avoir honte de ne pas savoir bien jouer. » se moqua ouvertement Jaina Rosenberg qui grâce à sa compétence Fast Draw, dégaina dans un éclair Pearl son revolver de l'holster. Elle plaqua le canon sous le menton d'un yakuza qui désirait pointer sa carabine sur la cow-girl. « Trop lent. Retourne jouer à t'occuper des veaux plutôt qu'à jouer au pistolero. » gronda l'albinos qui aspirait à être la reine du tir.

La partie reprit, le deuxième round sonna et malheureusement pour Jaina, sa main était encore mauvaise dès le départ. Effectuant une petite grimace en mordant sa lèvre inférieure, la cow-girl changea l’intégralité de son jeu. Quand le croupier donna cinq nouvelles cartes à l’albinos, cette dernière se réjouit silencieusement. Trois rois, de quoi corser un peu cette deuxième manche. Dommage que ces deux autres cartes qui sont un trèfle de six et un dix de cœur ne lui accordait pas un meilleur jeu.

Observant une Ayami partiellement nerveuse, Jaina tomba dans le panneau en pensant que la chance n’était pas de son côté. Naïve sur son éventuelle victoire, l’albinos imagina présenter ses cartes et avant même que son adversaire dévoila son jeu, Jaina s’apprêta à récupérer les jetons. Hélas, une quinte flush se présenta devant la joueuse. Perdu. Oui ce fut le mot pour désigner la défaite de Jaina Rosenberg. Elle claque ses cartes sur la table.

Reprenant sa place, croisant ses bras sous sa poitrine généreuse et affichant un visage boudeur, la mauvaise joueuse du nom de Jaina n’était pas heureuse de perdre cette manche.

« Tu gagnes renarde… » conclut l’albinos qui planta férocement sa fourchette dans le reste de son poulet. « Mais pas la guerre ! » gronda la perdante qui dégaina à nouveau son flingue pour menacer la gérante. « Et si nous allions discuter dehors ? » proposa l’albinos qui était cernée par les nombreux yakuzas armés jusqu’aux dents. Autant dire que Jaina n’était pour le moment pas en mesure de dominer quoi que ce soit. « Je vous conseille de pas m’énerver, j’ai le doigt sensible sur la détente en ce moment. Ce serait dommage que votre patronne en pâtisse non ? »

Autant dire que l'ambiance tournait au vinaigre à cause de la mauvaise joueuse. Elle avait osé pointer l'un de ses revolvers sur la gérante. Une simple innocente qui n'avait même pas montré les crocs à l'albinos. Jaina joua un jeu très risqué en souhaitant perturber la tranquillité de cet établissement. Néanmoins, ce début de mésaventure fut loin d'être la plus périlleuse depuis son bannissement au ranch. Que ce soit homme de la loi ou hors-la-loi, l'albinos marchait sur ces derniers sans se préoccuper des représailles qui pouvaient tomber derrière.

Au moment où certains yakuzas souhaitèrent agir pour protéger la Mink, Jaina titilla encore plus son index sur la détente. Elle venait d'appuyer légèrement sur le mécanisme. Encore une petite pression et le percuteur effectuera son travail habituel. Faire péter la poudre pour éjecter la balle du canon.

Dans un coin de son esprit, Jaina nota les réponses de la femme. À propos de son mariage arrangé qui était un honneur pour Ayami. Puis des personnes importantes se trouvant, selon les dires de la joueuse à Honnoji. Il était probable que son maître Pierce l'envoie prochainement à cette destination. Si elle obtient bien entendu des consignes du cow-boy aveugle.

À propos de la tension de tout à l'heure, elle devint très calme par un simple geste de la main de la renarde. Jaina ne pouvait pas le nier, Ayami dégageait une grande autorité dans ces lieux. Pour être une épouse d'un second lieutenant d'un clan Yakuza, cela montrait que sa femme n'était pas une moins que rien ou une simple chaussette. Elle avait du pouvoir.

Se levant de sa chaise après Ayami Date, Jaina suivit la demoiselle en gardant son arme braquée sur sa cible. En sortant de l'établissement, la rose décida de reposer Annie dans le holster. Inutile de rameuter d'autres problèmes. Enfilant ses lunettes de soleil puis se grillant une bonne cigarette, la cow-girl marcha aux côtés de son ancienne adversaire de poker.

« Là où je suis née, il est rare de voir des femmes avoir autant de pouvoir. » dévoila Jaina qui posa ses rubis sur une mère donnant un bonbon à sa fille. « Tes gars sont trop tendus, s'ils continuent je risque de réellement m'énerver contre eux. » prévint-elle en retirant sa cibiche de ses lèvres pour y tapoter le dos. Les cendres tombèrent sur le sol et d'autres s'envolèrent par la force du vent.

« Tu as le droit de me poser deux questions princesse. Tu as gagné la deuxième manche après tout. »