Un échange musclé

Assise sur un tapis dans une salle d’entraînement, Holmes en tenue de sport c’est-à-dire avec un haut noir cachant juste sa poitrine, un pantalon de la même couleur de bonnes chaussures, lisait tranquillement un livre sur un auteur assez connu en Angleterre. L’ouvrage explique comment se sortir d’un deuil sévère par d’innombrables méthodes. Passant son index sur sa langue, elle tourne ensuite une page du bouquin en la lisant à très grande vitesse. Son palais mental enregistre les informations dites utiles et supprime le restant pour avoir un maximum de place. Quand son deuil sera terminé, la détective compte supprimer les informations de ce livre qui ne seront plus utiles à l’avenir. Plus de quatre-vingt-quinze pourcents de ce bouquin sont ennuyants et absolument pas utiles pour la Sherlock. Quel dommage que cet ouvrage ternit la réputation de l’écrivain. Risa ferme donc le livre et soupire doucement. D’un petit effort, elle se relève, enfile ses anneaux de Poséidon et s’approche des cibles. Lentement, ses paupières se ferment, son esprit arrête toutes activités pour se concentrer sur une unique tâche : l’Innocence.

Les illustrations des anneaux de Holmes s’illuminent d’un vert émeraude majestueux. Ses poings se ferment et progressivement l’eau environnante forme des mandalas sur ces derniers pour devenir des boucliers. Alors, la demoiselle effectue des mouvements dans le vide pour simuler un affrontement qui se déroule dans son esprit qui peut à présent lâcher la pression sur l’Innocence. Ses paupières sont toujours fermées et l’Anglaise est en symbiose avec son palais mental. Ses mouvements ressemblent à une danse étrange, mais jolie à l’œil nue. Cela fait trois ans jour pour jour que Risa fuyait ses responsabilités d’Exorciste. Elle ne s’est jamais vraiment battue contre des Akumas. Le nombre ne se limite qu’à deux ou trois démons. De plus, la demoiselle ne sait pas ce que ça fait de se battre contre un niveau deux. Elle qui se croyait la plus intelligente est en réalité une faiblarde. Holmes compte corriger ce grand défaut et devenir comme Cloud Nine, une Exorciste de haut niveau. Peut-être qu’un jour, Risa pourra se tenir en égal avec sa Maréchale. De toute manière, la femme doit devenir forte pour pouvoir protéger les personnes qui en ont besoin. Si sa fille est morte, c’est en partie à cause de son manque d’entraînement mais surtout à cause de son idiotie d’être la meilleure que tout le monde.

Ses mouvements sont beaucoup plus violents, mal coordonnées car ses émotions négatives l’empêchent de se concentrer. Elle finit par se stopper et attrape de l’eau pour se rassasier. Les gouttes de sueur perlent le long de son corps. Holmes s’essuie le visage avec une serviette et tend sa main en direction d’une cible. Un javelot d’eau se forme assez lentement près de sa silhouette puis est projeté sur le mannequin. Risa manque sa cible et le javelot explose contre le mur. L’Anglaise peste mais ne compte pas abandonner pour autant. Elle retente une seconde fois et le mannequin est enfin touché par l’attaque de l’Exorciste. Un fin sourire de victoire s’affiche sur le visage de la désespérée.

Holmes désactive son Innocence, place sa serviette derrière sa nuque et ses épaules puis débute des séries de coups de poing sur un sac de frappe. Au début, sa boxe anglaise est assez calme et ordonnée, mais quand elle se remémore soudainement ce qui s’est passé avec Seth Moriarty, la demoiselle n’arrive pas à contenir sa rage et sa colère. Le sac de frappe prend la forme de son ex-époux et les poings de la Sherlock sont plus rapides, plus fort, plus rageux. Elle pourrait limite s’en faire saigner les mains tellement que sa colère est grande envers cet homme qui a fini en état de crêpe. En réalité, la solution n’existe pas. Risa va devoir vivre sans sa fille toute sa vie et continuer à ressentir cette déprime qui déchire son moral depuis bien trop longtemps. L’Anglaise s’en veut énormément d’avoir été aussi stupide. Le karma est bien trop cruel envers elle. Risa lève sa main, active son Innocence, forme en vitesse un javelot de Rhodé et transperce le sac de frappe. Son souffle est court, son palais mental est en bordel et ses mains lui font un mal de chien. D’ailleurs, elle ne remarque pas que quelqu’un vient d’entrer dans la salle. Est-il là depuis longtemps, impossible de le savoir et après tout, Risa n’a pas très envie de connaître cette vérité.

Holmes essuie son front, ses joues, son ventre avec quelques abdos puis enlève les bandeaux à ses mains qui sont en fait recouvertes de sang. Peut-être que la Sherlock est allée beaucoup trop fort sur sa boxe anglaise.

« Bonjour. » fit-elle à l’inconnu en prenant une gorgée d’eau. « Je suis désolée pour tout ce chantier. » Elle désigne le sac de frappe en deux qui vient de se vider de son contenu.

   

Saisissant un balai entreposé dans un petit coin de la salle d’entraînement, la demoiselle commence à balayer le chantier qu’elle vient de commettre à cause de sa colère. Risa ne prête plus trop attention à l’individu qui vient d’entrer. Ses excuses ont été répondu par un simple petit bonjour. Du coup, Holmes se dit que l’homme ne souhaite pas être dérangé, ne désire pas parler. En attendant, d’innombrables questions flottent autour d’elle à propos de cet inconnu recouvert de bandages et assez mal en point. Il lui a fallu que quelques secondes pour remarquer plusieurs détails, plusieurs déductions et théories qui peuvent en dire beaucoup sur cet homme plus âgé que cette dernière. Il semble avoir vu le diable en personne. Il a dû être rejeté par la mort elle-même et le laisser dans un état absolument pitoyable. Son regard est mort, son corps est meurtri, est-il tout comme elle, un Exorciste ? De son métissage, de son visage, de ses cheveux, ses origines désignent un pays éloigné et dominé par les Akumas : Le Japon. Pourtant, la forme de son nez, de ses lèvres, la taille de ses mains contredisent sa déduction. Peut-être est-il issu d’un mariage entre deux pays. Tant de questions sans réponses et la Sherlock doit plutôt se concentrer sur ce petit ménage non désiré par sa propre faute. Elle qui n’a pas trop l’habitude de ce genre de chose car ses domestiques le faisaient à sa place, Holmes se dit que cette activité ne doit pas être appréciée par tout le monde. En tout cas, pour elle, le ménage n’est pas une chose qui compte rester dans son cœur. Elle peste donc, en voyant que le balai n’est pas efficace pour rassembler ce que le sac vient de disperser sur le sol. Sa colère monte, son envie de jeter l’objet est pesante mais la voix de l’inconnu l’empêche de déclencher une seconde tempête.

Ce dernier lui propose de s’entraîner sur une cible vivante. Il est vrai que c’est mieux, ça forme beaucoup plus que sur des objets statiques qui n’ont pas demandé à recevoir d’innombrables coups. Mais si l’individu souhaite servir de partenaire pour la détective, cela va être problématique. Experte en boxe anglaise, en jujutsu, et aussi d’un style de combat basé sur la canne de Vigny, Risa risque de casser en deux son adversaire. Cependant, Holmes a compris une chose depuis quelque temps. Il ne faut jamais sous-estimer son adversaire que ce soit sur sa taille, sa morphologie, son état de santé, ses blessures et autres. Alors, la femme se met face à lui, à une distance raisonnable pour ne pas le regarder de haut et ainsi lui manquer de respect.

De sa main droite sur son cœur, elle s’incline sous forme de salutation.

« Je m’appelle Risa. Risa Holmes Drake. » se présente la demoiselle en lui adressant un sourire courtois. « Je serais honorée de pouvoir échanger quelques coups en votre compagnie. Mais est-ce bien sage de le faire au vu de votre état ? Vous me semblez très mal en point et je ne souhaiterais guère aggraver sans le vouloir vos blessures. »

En se redressant, Risa sent quelque chose en cet homme. Elle pense qu’il vient de réaliser un effort pour lui adresser la parole à cause de l’expression de son visage. Du coup, la Sherlock ne souhaite pas le décevoir et lui manquer de respect. Elle y tient, car son côté chevaleresque est toujours présent et ne souhaite pas la quitter.

« Puis-je plutôt vous proposez un petit exercice pour vous permettre d’apaiser la douleur de vos blessures au cours d’une situation délicate ? » demande l’Anglaise en continuant son petit ménage. « Mais si vous tenez tant à un entraînement rude, je me plierais à votre volonté. Je m’inquiète juste pour votre état de santé sans vouloir vous offenser. »

Elle désigne d’un petit geste de tête une zone pour méditer.

« Si vous acceptez mon petit exercice, je vous apprendrais à maîtriser votre souffle par de la méditation. » La détective termine enfin son ménage interminable et éprouvant. « Plus vous maintenez votre souffle, et plus vous aurez d’incroyables réflexes pour éviter des situations critiques. »